oh i love her because she moves on her own way

un ©, deux © envol bleu ✤ she moves on her own way.

Cette gosse a toujours été incroyable. Elle avait cette propension à toujours fuir les sentiments, à toujours se cacher derrière un événements, contourner l'évidence, refaire les nœuds que quiconque cherchait à défaire sans jamais se faire choper. C'est le genre de gamine qui laisse un immense trou quand elle quitte ta vie. C'est le genre de fille qui se laisse pas berner par le premier con, le genre de fille qui aime son statut de gazelle libre de ses mouvements. C'est le genre de fille qui peut te faire baisser la garde en un regard ; tu sais le genre de fille pour qui tu ferais sortir une planète de son orbite, histoire de la voir sourire. Elle a un sourire qui fend la nuit et une démarche qui donne envie de la suivre n'importe où. Les pans ondulés de sa jupe un peu trop courte pour être homologuée fait vibrer la rétine des mecs, les cordes vocales des langues de vipère. Sa peau opaline absorbe la lumière sans jamais la rendre — sérieusement, elle brille pas c'te meuf, elle est sombre mais ça lui va bien, ça la rend encore plus belle. Et les trois quarts du temps, quand elle ouvre la bouche c'est pour te dire de la fermer. « Tu vas où là Lou ? » « Ta gueule Jay. J'suis ta sœur pas ta gosse. »

J'avais entendu la porte claquer discrètement, entendu Lou fourrer ses chaussures dans le meuble en bois ciré et sa respiration se calmer à mesure qu'elle se rapprochait de la chambre. J'savais très bien qu'elle faisait des conneries plus grosses que les miennes. J'me sentais déjà en infraction permanente quand j'fumais une clope sur le trottoir en face du lycée, j'comprenais pas comment elle gardait son sang-froid. Elle dissimulait tout derrière son sourire serein et son silence. « Hé Jay passe-moi un oreiller s'te plaît ! » je m'exécutais sans trop broncher ou chercher d'excuse bidon. Chaque fois qu'elle rentrais comme une criminelle qui venait d'accomplir son méfait le plus vicieux à une heure trop tardive pour qu'on puisse trouver ça banal, elle glissait sa mèche de cheveux derrière son oreille et tournait son visage vers moi. « Tu m'aimes toujours hein Jay ? » quand on avait quinze piges je répondais oui et je souriais. Depuis quelques temps, le dialogue est plutôt sec entre nous. On s'aime, on est liés, toujours là l'un pour l'autre mais incapable de mettre des mots dessus. J'crois que son mutisme a grandi avec elle et qu'elle a compris qu'elle me la faisait plus à moi — vous savez le coup de la meuf qui ressent rien. C'était sûrement dû au fait qu'elle et moi, on avait échangé trop de moments complices. J'avais vu plus d'une fois l'étincelle dans ses yeux — celle qui confirme qu'elle est éternelle blessée. Je sais quand elle est amoureuse, quand elle est blessée, contrariée, blasée, touchée, compatissante ou incomprise. Elle fait toujours la même tête, donne toujours cette impression de détachement permanent ; mais tout réside dans son foutu regard qui pourtant n'a pas l'air moins mort que sa personne. Et j'sais qu'elle rêve d'être libre. Qu'elle a une passion infinie pour les grandes routes et le continent américain. Ouais, Lou elle rêve en grand et elle rêve de faire le genre de voyage sans fin qui mêle excitation, danger et aventure.

Mais je l'aime comme ça moi Lou, comme un abruti de frère qui sait à quel point elle est tarée sous ses airs d'ange intouchable.